#Neurosciences - La mémoire, comment ça marche ?
----- Traduction de :
https://www.scientificamerican.com/article/storytelling-methods-alter-how-memories-are-stored-in-the-brain/
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Le cerveau se souvient différemment des histoires en fonction de la façon dont elles ont été racontées
Raconter la même histoire de différentes manières peut modifier les réseaux cérébraux utilisés par l'auditrice ou l'auditeur pour former ses souvenirs.
20 octobre 2025
Par Allison Parshall,
édité par Sarah Lewin Frasier
Parlez-moi de ce que vous avez mangé hier soir.
Il existe différentes manières de détailler cette histoire. Vous pouvez donner des descriptions perceptuelles de l'apparence et du goût de votre plat. Vous pouvez aussi vous concentrer davantage sur des expériences conceptuelles comme ce à quoi cet aliment vous a fait penser et ce qu'il vous a fait ressentir. Dans une nouvelle étude, via scanners cérébraux, des neuroscientifiques ont découvert que raconter la même histoire de façons différentes active des mécanismes de mémorisation différents dans le cerveau à l'écoute qui influencent comment il retient ce qu'on lui a raconté.
Les résultats ne suggèrent pas que l'une ou l'autre forme de narration – conceptuelle ou perceptuelle – soit nécessairement plus facile à mémoriser que l'autre ; les participants à la nouvelle étude se souvenaient des histoires racontées de manière à peu près égale selon ces deux modes mais les résultats montrent que différentes techniques de narration modifient la façon dont l'information est stockée et récupérée, ce qui pourrait expliquer pourquoi certaines personnes se souviennent mieux que d'autres d'histoires contenant certains types d'informations.
« Certaines personnes se souviennent davantage de leurs souvenirs perceptifs, tandis que d'autres se souviennent davantage de leurs souvenirs conceptuels », explique la Dr Signy Sheldon, auteure principale et psychologue spécialisée sur la mémoire à l'Université McGill. Les résultats ont été publiés dans JNeurosci lundi et seront présentés lors de la conférence de la Society for Neuroscience le mois prochain.
Les souvenirs ne sont pas stockés en un seul endroit das le cerveau. Les traces mnésiques sont réparties dans des réseaux situés dans les couches corticales, externes, du cerveau. Ces réseaux sont connectés à une structure cérébrale profonde, appelée l'hippocampe, qui contribue à la formation, l'indexation et la récupération des souvenirs.
Lors de la formation d'un souvenir, l'hippocampe a tendance à interagir avec certains de ces réseaux cérébraux plus qu'avec d'autres. La Dr Sheldon et ses collègues ont voulu vérifier si des récits relatant exactement les mêmes événements mais racontés avec des types de détails différents activaient des réseaux différents de l'hippocampe. Ils ont recruté 35 participants pour écouter trois histoires banales devant un scanner d'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf). Chaque histoire – celle de courses, d'un trajet à l'aéroport ou d'une sortie au restaurant avec un ami – comportait deux versions différentes, avec des détails conceptuels ou perceptifs intégrés au même récit global.
Par exemple, dans une des deux versions de l'histoire du restaurant, le narrateur dit « Un peu plus tard, le serveur nous a finalement apporté notre repas. Je me souviens avoir pensé que les pâtes étaient délicieuses. Avec le recul, je ne sais plus si c'était parce que j'avais faim ou parce que la nourriture était vraiment bonne.» Dans l'autre version, ils racontent : « Un peu plus tard, le serveur nous a finalement apporté notre repas. Je me souviens du moulin à poivre de soixante centimètres qu'il utilisait pour assaisonner nos plats. Mes spaghettis étaient enroulés autour de trois boulettes de viande dans mon assiette. C'était vraiment délicieux. » Après avoir écouté et mémorisé les histoires dans le scanner, les participants ont été invités à les raconter aux chercheurs.
Lorsque les participants se souvenaient des histoires entendues avec des détails conceptuels au scanner leur hippocampe s'activait en même temps que des parties d'un réseau cortical appelé réseau du mode par défaut (RMD), actif lors du traitement des informations sur soi, ses émotions, etc. En revanche, lorsqu'ils se souvenaient d'histoires riches en perceptions, l'hippocampe s'activait en même temps que des réseaux cérébraux extérieurs au RMD, notamment le gyrus angulaire gauche. Cette région cérébrale est connue pour être active lors du rappel de souvenirs contenant des détails sensoriels variés.
« Je pense que cela correspond à peu près à ce que je pensais », explique le Dr Hongmi Lee, psychologue cognitive étudiant la mémoire à l'Université Purdue, qui n'a pas participé à cette nouvelle étude. Le RMD traite des informations abstraites de haut niveau ; il est donc logique qu'il intervienne pour stocker et récupérer une histoire riche en détails conceptuels.
Bien que les participants se souviennent aussi bien des deux types d'histoires à court terme, ils avaient tendance à préférer les histoires conceptuelles aux histoires perceptives et étaient plus confiants dans leurs souvenirs. « Ces détails conceptuels constituent souvent une part importante de ce dont les gens se souviennent d'une histoire », explique le Dr Chris Baldassano, psychologue spécialisé en mémoire à l'Université Columbia, qui n'a pas non plus participé à la nouvelle étude. « Si vous regardez un film, vous vous souviendrez peut-être de certains détails perceptifs, surtout s'il contient des images saisissantes mais une grande partie du cœur de l'histoire réside dans les éléments conceptuels qui se produisent : les interactions sociales, les personnages, vos émotions. »
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